Par France Labossière
Publié dans le Courrier de Saint-Hyacinthe le 12 novembre 2009.
Maison Aimé Amyot
Nous débutons aujourd’hui une nouvelle série qui nous fera découvrir quatre résidences de la rue Girouard ayant été habitées par des industriels maskoutains qui ont autrefois œuvré dans quatre différentes sphères du secteur manufacturier : les domaines du textile, de la mécanique, de la chaussure et de la fabrication d’orgues.
Vers la fin du XIXe siècle, l’industrie du textile est sans contredit l’un des domaines d’activités manufacturières les plus importants de la ville de Saint-Hyacinthe. Nous parlerons d’une maison ayant été habitée par Monsieur Aimé Amyot, industriel du domaine du textile et conseiller municipal durant le mandat du maire Paul-Frédérique Payan (1910-1914), qui est située sur la rue Girouard, face à la rue Raymond.
En 1901, l’épouse de monsieur Amyot acquiert une partie du terrain appartenant à la famille Raymond, comme écrit au contrat notarié en date du 24 avril 1901 : « Mme Eugénie Bourdon, veuve de Noé Raymond, en son vivant marchand demeurant en la cité de St-Hyacinthe…a reconnu avoir vendu à Mme Virginie Ledoux épouse séparée quant aux biens de M. Aimé Amyot comptable… un emplacement sis et situé en la quartier numéro cinq…borné en front par la rue Girouard, en profondeur par la RivièreYamaska…sans bâtisse…La façade de la maison ou de toute autre construction sur ce terrain ne devra pas être plus proche que dix pieds de la clôture actuelle en front de ce terrain… »
La maison fut construite en 1901 également, puisque madame Amyot, par contrat notarié en date du 3 septembre 1901, hypothèque l’emplacement décrit ci-haut… « avec les bâtisses dessus érigées, et pour plus grande sûreté, la débitrice s’oblige de tenir assurées contre le feu les bâtisses sur ce terrain en faveur du créancier.»
Bâtie en déclin de bois, la demeure est agrémentée en façade d’une galerie semi-circulaire surmontant deux bay-windows et se prolongeant au-dessus des entrées latérales. Une seule cheminée domine le toit pavillon surmonté d’une crête de fer forgé. Un épi s’élance au milieu du pignon central, élément manifestement néo-gothique. La maison, qui est conçue avec un évident désir de symétrie comme en témoigne l’organisation des volumes et des ouvertures, est représentative du retour en force du classicisme au début du 20ième siècle, à l’opposé des compositions asymétriques et pittoresques victoriennes.
Fait surprenant, monsieur et madame Amyot font construire cette maison à logements tout en demeurant locataires puisque le bottin de 1904 indique qu’ils habitent au 2325 Girouard, soit dans la maison voisine. En 1912 toutefois, les Amyot ont déjà emménagé dans la maison puisqu’une photographie de la maison publiée dans la revue Saint-Hyacinthe P.Q. Canada indique sous la photo en page 16 au no 7 : Echevin (Alderman) Aimé Amyot. En effet, la revue éditée par The Commercial Magazine Company Limited, pour « avancer les intérêts de la ville de Saint-Hyacinthe, Qué., et attirer l’attention sur les avantages exceptionnels qu’elle offre pour l’établissement d’industries et manufactures », publiait à l’époque les photographies des maisons des conseillers municipaux !
La même revue publie en page 29 une photographie de la manufacture appartenant à monsieur Amyot. C’est un bâtiment situé sur la rue Saint-Antoine, derrière le marché centre, édifice construit, d’après Hélène Hébert, dans son livre Saint-Hyacinthe, Un regard sur deux siècles d’histoire, après l’incendie de 1903 et abritant, outre la manufacture, les magasins Lefebvre Larivière et Bourdages, ainsi que l’hôtel Frontenac.
Une affiche en façade indique le nom de l’entreprise ‘ A. Amyot & cie’, et on peut lire, sous la photo : ‘Manufacturiers en Gros de Vêtements pour hommes et enfants’. L’entreprise est décrite comme suit en page 41 : « Une autre industrie très importante est celle de A. Amyot et Cie, établie il y a onze ans sous la raison sociale de Eastern Clothing Co., par Amyot et Poirier, mais le nom a dernièrement changé en celui de A. Amyot et Cie ce dernier étant maintenant le seul propriétaire. Cette manufacture emploie 100 personnes à la confection des hardes faites, pour hommes, garçons et enfants, à qui elle paye $25 000 de salaires par année. La Compagnie est représentée par cinq voyageurs vendant ses produits dans les provinces de Québec, Ontario, Nouveau Brunswick et Nouvelle Ecosse. »
Les éphémérides publiées par le Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe confirment que c’est bien en 1901 que messieurs M.-O David, J.F. Poirier et Aimé Amyot établissent une manufacture de vêtements sous le nom de Eastern Clothing Co et qu’en 1907, monsieur David se retire de la compagnie qui devient alors Amyot & Poirier. En 1911, monsieur Amyot achète les intérêts de son copropriétaire et la compagnie, qui sera en activité jusqu’en 1916, devient A. Amyot & Cie.
Photos:
Maison Amyot, située aux 2345-2353, rue Girouard Ouest vers 1910.Collection Centre d'histoire de Saint-Hyacinthe, CH085 Studio B.J. Hébert.
Photo France Labossière 2007.
Cet article est le cinquième d'une longue série.