Le barreau de Saint-Hyacinthe, il y a cent ans (1)

Par Philippe Pothier. 
Publié dans Le Courrier de Saint-Hyacinthe le 11 septembre 1985.

Voici le premier article d'une grande série sur les personnalités formant le Barreau maskoutain vers la fin du XIXe siècle.

À l’occasion du congrès de la fédération des Sociétés d’histoire, qui s’est tenu à Saint-Hyacinthe à la fin du mois de mai 1985, M. le Juge Philippe Pothier a présenté une causerie intitulée «Le Barreau de Saint-Hyacinthe il y a cent ans». Dans cette causerie, M. le Juge fait revivre les principales figures qui composaient alors le Barreau maskoutain. Nous avons pensé intéresser les lecteurs en leur présentant chaque semaine l'une des principales figures de ce Barreau. 

Présentation générale
Il n'y a pas un barreau dans la province de Québec qui, il y a une centaine d'années et surtout dans la seconde moitié du dix-neuvième siècle, a connu autant de notoriété que le groupe d'avocats qui composaient celui de Saint-Hyacinthe. Même les districts de Montréal et Québec, malgré une population plus nombreuse et un plus grand nombre de praticiens, n'ont pas eu, à un moment donné, de personnages aussi célèbres dans la carrière légale et la politique.
 
D'après une photographie de janvier 1873 conservée dans les archives du Centre d'histoire de Saint-Hyacinthe, l'on y dénombre vingt-deux avocats, ce qui était une proportion considérable pour une population de justiciables qui dépassait à peine les cinq mille dans le district judiciaire en  entier.  En voici la liste:
 
Louis-Victor Sicotte, premier ministre du Canada et juge à la Cour supérieure; Honoré Mercier, premier ministre de la Province de Québec; Raphaël Fontaine, Jean-Baptiste Bourgeois, Louis Tellier et Hubert Wilfrid Chagnon, juges à la Cour supérieure; Magloire Lanctôt, magistrat de district; Pierre Boucher de La Bruère, surintendant de l'Instruction Publique; Louis G. de Lorimier, protonotaire à la Cour supérieure; Joseph Roy, protonotaire à la Cour supérieure, Théodose S. Richer, protonotaire à la Cour supérieure;  Louis Delorme, greffier de l'Assemblée Législative; Thomas Alfred Bernier, sénateur;  Pierre Bachand, député et trésorier de la Province de Québec; Paul de Cazes, journaliste, secrétaire du département de l'Instruction Publique; J. Adolphe Chicoyne, journaliste et député; Lewis Francis  Morison, maire de Saint-Hyacinthe; Alphonse Lusignan, journaliste, secrétaire au ministère de la Justice à Québec; Auguste Cyrille Papineau, juge à la Cour supérieure; Jules Lamothe, David Forget et Firmin Beaudry, avocats.
 
Voilà les éminents disciples de Thémis qui ont fait partie en même temps du Barreau de Saint-Hyacinthe en l'année 1873.
 
Il conviendrait aussi de signaler quelques autres sommités qui, sans avoir toutes vécu ou exercé leur profession dans notre ville, ont fait leurs études classiques dans ce monument de culture qu'était  à cette époque le Séminaire de Saint-Hyacinthe.

Soulignons qu'il y eut sept lieutenant-gouverneurs de la province: Adolphe Chapleau, Roderick Masson, François Langelier, Louis-Philippe Brodeur, Narcisse Pérodeau et Gaspard Fauteux.

L'on compte également huit premiers ministres du Canada et de la province: Augustin Norbert Morin, Louis Victor Sicotte, Gédéon Ouimet, Charles de Boucherville, Honoré Mercier, Adolphe Chapleau, Félix Gabriel Marchand, Daniel Johnson et Jean-Jacques Bertrand. Un autre fut lieutenant-gouverneur de l'Ontario, Alexander Campbell, et Marc-Amable Girard, premier ministre du Manitoba.
 
Au moins deux anciens élèves furent nommés juges en chef de la Cour suprême du Canada: Louis-Philippe Brodeur et Gérald Fauteux; au moins cinq autres juges à la Cour d'appel: Charles Mondelet, Alexandre Lacoste, Fernand Choquette, Jean Martineau et Marcel Nichols; une trentaine à la Cour supérieure et autant dans les juridictions provinciales.
 
S'il ne convient pas de présenter une biographie de toutes ces éminentes personnalités qui ont illustré le barreau maskoutain, il convient cependant d'évoquer brièvement la carrière des plus remarquables afin de les faire découvrir à nos contemporains et  particulièrement à notre population régionale.
 
Ils ont tous fait partie de la vie de chez nous, ils ont circulé dans les mêmes rues et marché sur les mêmes espaces de terrain. Ils ont tous fréquenté les mêmes endroits que nous, les mêmes églises, le palais de justice, les mêmes institutions d'enseignement.
 
Ils ont tous connu notre vieux marché pour y faire leurs emplettes ainsi que quelques boutiques encore existantes. Ils se sont promenés sur la même rivière et dans les mêmes allées du parc Dessaulles. Les membres de leurs familles dorment encore dans le même cimetière. Ces gens sont tout près de nous et font encore partie de notre société.
 
Ils ont fait honneur au nom de notre ville partout dans la province et même à travers le pays. Plusieurs, surtout chez les plus jeunes, n'en ont jamais entendu parler. Peut-être est-il bon de leur en rappeler le souvenir.

Lors d'un prochain article, il sera question de l'Honorable Juge Louis-Victor Sicotte.

Photo: 
L'Honorable Honoré Mercier en 1873. Centre d'histoire de Saint-Hyacinthe, CH478.

Cet article est le premier d'une longue série.

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