La Tribune de Saint-Hyacinthe, 1888-1922 (2)

Par Luc Cordeau 
Publié dans le Courrier de Saint-Hyacinthe le 13 décembre 2006.

Catholique en religion, et libérale en politique, La Tribune prend sa place dans le milieu en cherchant à faire l’équilibre entre Le Courrier, d’allégeance conservatrice, porte-parole ultramontain du clergé de cette ville épiscopale, et de l’autre côté, La Gazette, L’Union et Le Clairon, journaux libéraux radicaux.

La fin de l’année 1909, a été éprouvante pour l’équipe du journal La Tribune. En effet, monsieur Alphonse Denis, fondateur du journal et copropriétaire, décède le dimanche 7 novembre, âgé de 63 ans. « Résidant de Saint-Hyacinthe depuis 1871, il est gérant du journal L’Union pendant plusieurs années. De 1887 à 1903, il est le Lieutenant-colonel du 84e régiment, de Saint-Hyacinthe » (Journal L’Union, 9 novembre 1909).

Quelques semaines plus tard, soit au cours de la nuit du 25 décembre, un incendie éclate au centre-ville de Saint-Hyacinthe, détruisant notamment les locaux de La Tribune. Journal La Tribune, 31 décembre 1909 : « D’ici à une couple de semaine, La Tribune sera imprimée dans les ateliers de notre confrère Le Courrier de Saint-Hyacinthe qui nous a très gracieusement ouvert ses portes. Nos annonceurs ne nous en voudront pas trop, si nous ne faisons pas les changements ordinaires dans nos annonces. Le feu de la semaine dernière a mis un tel désarroi dans notre matériel, que nous ne pouvons plus nous comprendre. Dans une quinzaine de jours, nous prendrons possession de l’ancien magasin de M. Alfred Lapalme, sur la rue Saint-Antoine, et nous y resterons jusqu’au printemps au moins ».

Le 29 décembre 1922, Eugène Chartier met la clé dans la porte de La Tribune, mettant ainsi fin à une aventure de trente-quatre années. « La Tribune disparaît malgré notre désir sincère de lui continuer la vie. Ses directeurs financiers et ses bailleurs de fonds ont cru devoir refuser notre offre pour résumer leurs aspirations dans une autre organisation dont ils se sont assurés le contrôle […]. Tous nos lecteurs nous feront crédit de notre parfaite indépendance depuis que nous dirigeons La Tribune. Nous avons lutté avec conscience et sans autre ambition que de faire triompher la justice contre l’injustice […]. Rentré pauvre à La Tribune, nous en sortons de même. Outre le maigre salaire que nous y avons gagné péniblement, nous n’avons jamais reçu la moindre récompense pécuniaire ou autre, pour tous les services  rendus […] ».

Pour Chartier, l’arrêt de la publication du journal ne semblait pas permanente : « Avec le 31 décembre prochain, La Tribune suspend sa publication. Notre atelier arrête également ses travaux. Aussi longtemps que cet état de chose durera, nos abonnés recevront Le Courrier de Saint-Hyacinthe. Cet arrangement, intervenu avec l’administration de ce journal, nous permet de continuer notre service à tous ceux qui ont payé leur abonnement d’avance. Jusqu’à ce que nous ayons définitivement fait les transformations nécessaires, nous prions nos correspondants, nos collaborateurs, nos annonceurs, les clients de nos ateliers de s’adresser pour tout au Courrier, sur la rue Saint-Anne » (La Tribune, 29 décembre 1922). Le tirage du journal sera de 2500 exemplaires en 1899, de 2000 en 1913, et de 1000 en 1921. La Tribune ne reprendra jamais ses activités. Quelques semaines plus tard, Chartier tente de se faire élire comme débuté lors des élections provinciales du 5 février 1923. Il sera défait.

Plusieurs rédacteurs directeurs ont œuvrés à La Tribune de Saint-Hyacinthe au cours des ans : J.-A Chagnon, 1888 ; P.-V. Vaillant, 1889-1890 ; A.-J. Dorion, 1890-1892 ; Alphonse Denis, 1892-1899, 1900-1905, 1907 ; Eugène Lamarche, 1905-1907 ; divers collaborateurs, 1907-1909 ; S.-J. Fréchette, 1909-1916 ; J.-P.-I. Gagnon, 1916 ; Eugène Chartier, 1917-1922. 

Au cours de son existence, La Tribune a connu plusieurs déménagements. Selon les informations disponibles, le journal était situé : 1) au 114, rue Des Cascades [de nos jours, le 1325], entre les rues Mondor et Duclos, à ses débuts en 1888 ; 2) au 153, Des Cascades [le 1520], face à la rue Saint-Simon, en 1894 ; 3) au 120, rue Saint-Antoine [le 1595], à l’arrière du Marché, en 1898 ; 4) au 108, rue Mondor [le 600], au Grand-hôtel, en 1900 ; 5) au 128, Des Cascades [le 1405], en 1904, mais à cet endroit, les locaux du journal sont détruits lors de l’incendie de la nuit de Noël 1909 ; 6) au 114, rue Saint-Antoine [le 1555], à l’arrière du Marché, en 1915 [peut-être dès 1909-1910] ; 7) au 88, rue Sainte-Anne [le 965], à l’angle de la rue Dessaulles, en 1920, et lors de sa fermeture en 1922.

Photo:
Au centre, locaux de La Tribune, au 1555, rue Saint-Antoine, vers 1918.
Studio B-J Hébert, collection Centre d'histoirede Saint-Hyacinthe.

Cet article est le deuxième d'une série de deux.

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