Toutes les inondations dont nous avons traité jusqu’à présent sont survenues au moment de la fonte des neiges au printemps. Elles ont ensuite été aggravées selon les embâcles ou la présence de précipitation. Or, à Saint-Hyacinthe, les inondations ne se sont pas produites qu’au printemps et il est aussi fréquent d’être inondé uniquement à cause d’une période de fortes précipitations et ce, toutes saisons confondues.
C’est ce qui se produit la nuit du vendredi 4 novembre 1927, où une forte pluie qui dure depuis la veille sévit dans toute la région. Dès cette journée, le bas de la ville se retrouve inondé par l’impressionnante quantité d’eau qui tombe du ciel. Comme le relève dans son journal Léon Pratte, le supérieur du Séminaire de Saint-Hyacinthe, plusieurs maisons sont déjà à l’eau.
La situation s’aggrave le 5 novembre, malgré le fait que la pluie cesse de tomber. En effet, l’élévation de l’eau augmente à cause du ruissellement constant de l’eau qui s’effectue vers la rivière jusqu’à atteindre un niveau rarement vu auparavant. Toutes les maisons qui se situent sur les rues Vaudreuil et Brodeur ont de l’eau qui atteint le deuxième étage. En bas du barrage, près de l’usine Penman’s, les flots atteignent entre quatre et cinq mètres : « L’inondation est probablement la plus grave que l’on ait connue à Saint-Hyacinthe; les vieux citoyens ne se rappellent que de celle de 1903 ».
Avec toute cette quantité d’eau, tout le bas de la ville est inondé jusqu’à la rue Saint-Antoine derrière le marché centre. Le Courrier évalue à 250 le nombre de familles qui ont dû trouver refuge chez des proches afin d’être logés et nourris le temps que l’inondation se résorbe. Le Clairon évalue, de son côté, à 1300 personnes le nombre de sinistrés avec des pertes occasionnées d’environ 65 000 $.
Cette montée des eaux soudaines a encore une fois endommagé tous les commerces, les moulins et la tannerie qui se situent près de la rivière, tout en paralysant leurs activités. C’est le caractère soudain de cette inondation qui frappe l’imaginaire. La rivière a pris cette proportion en moins de 48 heures, en plein mois de novembre. L’infiltration des soubassements par l’eau est inévitable et dévastatrice pour la marchandise qui y est stockée. La hauteur exceptionnelle de la crue fait en sorte que dans les résidences, les meubles sont particulièrement endommagés. Un fait, qui indispose davantage les citoyens, est que l’inondation touche parfois leurs provisions d’hiver, que les familles ont stockées les gâtant. Privées d’ameublement et de provisions, certaines familles se retrouvent dans une situation particulièrement précaire pour affronter l’hiver.
Heureusement, l’eau ne reste pas longtemps à cette amplitude et dès la journée du 11 novembre, elle s’est complètement retirée. Évidemment, plusieurs caves sont toujours remplies et une épaisse couche de limon recouvre les rues du quartier Christ-Roi, ainsi que des débris apportés par le courant. Selon Le Courrier de Saint-Hyacinthe, les dégâts causés prendront une semaine avant d’être réparés.
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